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today16/04/2025
Moonrise Kingdom (2012) : Kara Hayward ©2012 Focus Features
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Davantage encore que celle d’un formaliste comme Pedro Almodóvar, auquel la Cinémathèque française avait consacré une exposition il y a une vingtaine d’années, la personnalité de Wes Anderson paraît se prêter idéalement à l’exercice d’un accrochage muséal, qui plus est à l’heure où son dernier film (The Phoenician Scheme, 2025) se voit sélectionné en compétition officielle par le Festival de Cannes 2025.
Généralement considéré comme un cinéaste de la « maîtrise », voire comme un metteur en scène « fétichiste », Wes Anderson n’a pas hésité dans ses films à recourir aux « effets de signature » (goût de la symétrie dans la composition des plans, travellings millimétrés, montage cut …) désormais assez repérables. C’est dire que le visiteur retrouvera avec régal, de maquettes en croquis, de costumes en marionnettes, de carnets de notes en tableaux fictifs, les éléments familiers du monde d’Anderson, devenu cohérent au moins depuis The Royal Tenenbaums (La Famille Tenenbaum, 2001). Parmi les morceaux de choix : la façade de The Grand Budapest Hotel, (2014), la toile peinte du Garçon à la pomme dans le même film, l’extra-terrestre d’Asteroid City (2023), les marionnettes animalières d’Andy Gent …
Mais ce que l’exposition, strictement chronologique, permet aussi de découvrir (ou de confirmer) c’est le caractère inclassable, et volontiers paradoxal, du cinéaste, décidément rétif aux étiquettes.
À première vue, la carte de l’île de New Penzance (Moonrise Kingdom, 2012) que présente l’accrochage incite à se dire que, décidément, pour Wes Anderson, la carte n’est pas le territoire, sinon le territoire de l’imaginaire. D’ailleurs, d’une manière symptomatique, Ralph Fiennes (un habitué de l’univers d’Anderson) explique dans le catalogue de l’exposition que les story boards animés (les « animatiques ») sont « comme une carte » pour Wes Anderson, et que ce dernier aime les interprétations de ses acteurs, mais qu’il les a déjà « cartographiées ».
En même temps, notre cinéaste insiste souvent sur le travail collectif que représente la réalisation d’un film, notamment avec les comédiens qui forment autour de lui comme une troupe (Owen Wilson, Jason Schwartzman, Bill Murray, Anjelica Huston …).
Si sa tendance à « pupettiser » certains personnages (le bonnet rouge, hommage au Commandant Cousteau, porté par les acteurs de The Life Aquatic with Steve Zissou/La Vie aquatique, 2004 …) ira jusqu’à lui faire réaliser de véritables films d’animation (Fantastic Mr. Fox, 2009, Isle of Dogs/L’île aux chiens, 2018), son recours au stop motion « à l’ancienne » témoigne, selon le mot de Lucia Savi, d’une « tension entre réalité et irréalité » (Lucia Savi est co-autrice avec Johanna Agerman Ross et Matthieu Orléan de l’ouvrage Wes Anderson : Les Archives).
Dans le même ordre d’idées, la formule la plus révélatrice pourrait être d’Anderson lui-même qui, à propos du train de The Darjeeling Limited (À bord du Darjeeling Limited, 2007) parle d’un « imaginaire bien réel ».
Si bien que le monde de Wes Anderson ne peut être dit strictement autarcique. Il s’ouvre sur le dehors, comme le révèlent son goût pour la littérature (jusqu’aux « livres fictionnels », entièrement inventés, de The Royal Tenenbaums !), son souci de l’Histoire du XXème siècle et ses influences musicales souvent décalées (de Françoise Hardy à Benjamin Britten en passant par les Beatles).
Contre toute attente, et malgré les diverses contraintes qu’il s’impose, c’est bien comme un cinéaste en quête de liberté qu’apparaît Wes Anderson au terme de l’exposition, à l’image de la démarche obstinée qui anime nombre de ses personnages.
Patrick Saffar
« J’ai visité la Cinémathèque pour la première fois il y a 25 ans, alors qu’elle se trouvait encore au Trocadéro, mais je l’avais déjà arpentée dans mon imagination (à travers les lettres de François Truffaut) à l’époque de l’avenue de Messine et de la rue d’Ulm – et d’une certaine manière, je relie indirectement ma propre éducation cinématographique à Henri Langlois et à ses acolytes – c’est donc un plaisir tout particulier pour moi que de participer à cette exposition, quel que soit ce que nous choisirons de présenter ! » Wes Anderson
1993 • Bottle Rocket (court métrage)
1996 • Bottle Rocket
1998 • Rushmore
2001 • La Famille Tenenbaum
2004 • La Vie aquatique
2007 • Hôtel Chevalier (court métrage)
2007 • À bord du Darjeeling Limited
2009 • Fantastic Mr. Fox
2012 • Moonrise Kingdom
2014 • The Grand Budapest Hotel
2018 • L’Île aux chiens
2021 • The French Dispatch
2023 • Asteroid City
2023 • La Merveilleuse Histoire de Henry Sugar et trois autres contes
2025 • The Phoenician Scheme
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Écrit par: CINEMUSIC Radio
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