EDDINGTON d’Ari Aster

24/07/2025

EDDINGTON d’Ari Aster

Actuellement à l’affiche en salles

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Par Patrick Saffar – Journaliste, historien et critique de cinéma

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Les premiers plans d’Eddington nous montrent un homme en haillons, arpentant un paysage tout en éructant des bouts de phrases incohérents, évoquant quelque caricature de prédicateur. Le déroulement du film amènera à se demander si ce pseudo-discours introductif n’était pas de nature eschatologique.

L’action, qui se situe en mai 2020 dans une petite ville imaginaire (Eddington) du Nouveau Mexique, donne en elle-même le sentiment qu’Ari Aster a voulu cocher toutes les cases de la contemporanéité pour rendre plus pertinent l’embrasement généralisé qui va emporter les habitants de cette localité : pandémie (la Covid-19 vient d’exploser au niveau mondial), complotisme, paranoïa collective, wokisme, fake news, drones, mouvement black lives matter, prise de pouvoir par les femmes … Le tout sur un fond vaguement archaïque, puisque le film est une sorte de western apocalyptique (photographié par Darius Khondji) et que les affrontements, même verbaux, n’en sont pas moins comme des gunfights.

Eddington ©2025 A24, Square Peg, Metropolitan

Le principal antagonisme met en présence Ted Garcia, maire d’Eddington (Pedro Pascal) et Joe Cross, le shérif local (Joaquin Phoenix), un individualiste forcené pour qui la fin justifie les moyens et qui s’oppose non sans mauvaise foi au port du masque. À partir du moment où le « représentant de l’ordre » décide de briguer la mairie, la bourgade devient ce chaudron où explosent les revendications (victimaires) les plus variées, dont Ari Aster cherche moins à questionner la pertinence qu’à montrer, avec un certain humour, les contradictions dans lesquelles elles en viennent à s’enferrer.

Eddington ©2025 A24, Square Peg, Metropolitan Filmexport

Si on peut s’interroger sur le degré de nihilisme, ou bien de lucidité, dont fait preuve ce précis de décomposition d’un échantillon de société américaine, on regrette sans nul doute la tournure prise par Eddington dans son dernier tiers, lorsque la pure et simple enquête policière le dispute au film horrifique dont Ari Aster s’était fait jusque-là une spécialité.

Patrick Saffar

Eddington. Réalisation, scénario, dialogues : Ari Aster ; interprétation : Joaquin Phoenix, Pedro Pascal, Emma Stone, Austin Butler, Musique originale : Daniel Pemberton & Bobby Krlic (États-Unis, 2024, 145 min).