Carnets de Cannes par Patrick Saffar

RÉSURRECTION (Kuang ye shi dai) de Bi Gan

today09/06/2025

Arrière-plan

RÉSURRECTION (Kuang ye shi dai) de Bi Gan

Carnets de Cannes : Regards sur la compétition officielle 2025

Par Patrick Saffar – Journaliste, historien et critique de cinéma

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Résurrection

Prix spécial du Festival de Cannes 2025

Ne serait-ce qu’au vu des avis négatifs suscités par le nouveau film de Bi Gan, on a envie de défendre ce Résurrection, sauvé in extremis pour participer à la sélection officielle : « il faudrait monter le film avec plus de liant et laisser respirer les personnages », « même en recomposant sans cesse son style visuel comme si l’inspiration débordait de partout, le film restera en manque cruel d’images qui transportent », « un sentiment d’ennui nous a saisi durant les deux heures quarante de la projection, le film ne s’imprimant pas réellement dans la rétine » etc.

Résurrection ©2025 Huace Pictures, Dangmai Films

 

Résurrection doit être pris en bloc, même s’il s’agit d’un film extrêmement composite au plan stylistique, encore davantage que le précédent film de Bi Gan, Un long voyage vers la nuit (2018), dont la seconde partie était filmée en 3D. Cette fois, le récit est structuré en cinq segments, dont chacun est consacré à un sens (vue, ouïe …) mais qui, tel Les Mille et une nuits, procure la sensation de pouvoir se perpétuer à l’infini. La première histoire, peut-être la plus « programmatique », débute à l’époque du muet (reconstitué en couleurs). Une femme (Shu Qi, inoubliée dans Millenium Mambo de Hou Hsiao-hsien) raconte un monde où la plupart des humains ne savent plus rêver. Pour eux, la vie continue, tout simplement, alors que d’autres, les « rêvoleurs », s’immergent en cachette dans leurs songes. De là, le film nous transporte d’un univers expressionniste (tendance germanique) fait de monstres et de vampires, à un réalisme qu’on n’ose qualifier de poétique, même s’il en vient à célébrer l’aurore d’un amour. Entre autres merveilles, un épisode au moins réussit à suggérer simultanément un homme en train de dormir et le contenu même de son rêve.

Résurrection ©2025 Huace Pictures, Dangmai Films

 

Si Résurrection peut se voir comme une ode au cinéma (finissant ?), une lecture anticapitaliste (les rêvoleurs pareils aux révolutionnaires) apparaît tout aussi pertinente : « qu’est-ce qui emplit un espace ? » demande l’enfant, « l’argent », répond l’homme, « non, la lumière », rétorque l’enfant.

Parfois, on se dit qu’il vaudrait mieux oublier Résurrection après l’avoir vu …

Patrick Saffar

Kuang Ye Shi Dai. Réal : Bi Gan ; sc, dial : Bi Gan, Zhai Xiaohui ; int : Yee Jackson, Shu Qi, Musique : M83 (Chine, 2025, 160 min).

 

Résurrection ©2025 Huace Pictures, Dangmai Films
Bi Gan ©2025 Huace Pictures, Dangmai Films

 

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Écrit par: CINEMUSIC Radio


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